La Nouvelle-Zélande a ceci de particulier qu’elle concentre sur un territoire plus petit que la France une multitude de paysages variés, dont certains sont typiques de rares endroits du monde. Volcans actifs (Ruapehu, Ngauruhoe et Tongariro dans l’île du nord) ou endormis, géothermie (Rotorua ressemblant à un petit Yellowstone), montagnes basses aux collines arrondies rappelant l’Écosse ou l’Irlande, plages sablonneuses désertiques, forêts tropicales humides, et « petite Patagonie » comme les deux glaciers qui nous attendent y prétendent. Car, de fait, ils sont les seuls en dehors de leurs frères chiliens, à descendre si bas et si près de la mer.


Entre les deux villages de Franz Josef et Fox, nous avons choisi le deuxième, car il est le plus petit. De fait, il possède très peu d’hôtels (plutôt des motels) et quasiment un seul restaurant. Innovant, nous avons pris chambre dans un hôtel aux allures de motel, éloigné de la bourgade, qui a l’avantage d’avoir une vue sur le Mont Cook et le Mont Tasman, pour peu qu’on daigne faire quelques pas en dehors de la chambre.


N’ayant qu’une journée à consacrer à cette partie des Alpes, peu de solutions s’offrent à nous si nous voulons atteindre rapidement l’un ou l’autre des glaciers, voire les deux, à une certaine altitude. En fait il n’y en a qu’une… l’hélicoptère !

Car ici, pas de route d’accès, pas de téléférique, même pas de chemins référencés.

Décision est donc de fêter (une fois de plus !) ma retraite, et de casser le porte-monnaie.

Nombreuses sont les compagnies à proposer des tours dans cet engin naturellement instable et néanmoins fort pratique. Les tarifs étant les mêmes pour les 5 ou 6 sociétés, nous allons tout simplement au bureau le plus proche…


Nous avons doublement de la chance. Le temps, une fois de plus, est au beau fixe. Et notre interlocutrice nous trouve (miraculeusement nous dit-elle) deux places dans le prochain vol, moins d’une heure après.

La carte bancaire une fois délestée de l’équivalent de plusieurs nuits en AirBnb, nous passons au salon en compagnie de deux Australiens et d’un petit groupe d’Indiens. Ces derniers, visiblement d’une caste supérieure et ayant tout l’air de « nouveaux riches », sont constitués de deux couples et de trois enfants d’une dizaine d’années. Ces derniers sont les archétypes de gamins gâtés, chougnant en permanence et gênant les explications données par un employé sur les instructions de sécurité à respecter. Pourvu qu’ils ne soient pas dans notre hélicoptère ! Un calcul mental et des plans tirés sur la comète nous incitent à espérer qu’un aéronef leur soit réservé, tout en plaignant d’avance le pilote.


Un court trajet est fait en minibus jusqu’au terrain d’envol. Là, notre crainte disparaît. Les Australiens et nous deux occuperons quatre des cinq sièges du premier hélicoptère. Les Aussies (surnom des Australiens) et nous-mêmes nous regardons, en échangeant des regards de soulagement.

Marie-José a œuvré merveilleusement auprès du pilote, je serai installé sur le siège avant, côté gauche. Je fais un check rapide de mon Olympus. Sensibilité réduite à 200 Asa, car je me méfie de la luminosité en haute altitude. Programme Vitesse pour limiter les vibrations dues à l’appareil. Les deux objectifs sont parés de filtres Polaroid pour limiter la réverbération et accentuer le ciel déjà outrageusement bleu. Les pare-soleil sont enlevés pour que je puisse mieux régler lesdits filtres pivotants.


Les ceintures sont attachées, aucun objet ou sac n’est toléré, le casque sur les oreilles, le moteur tourne et tout s’envole autour de l’hélicoptère; ça y est, nous décollons.

Un vol rapide au-dessus de la verdure, et nous attaquons les 12 km de montée le long du glacier Franz Josef. En quelques minutes nous atteignons son plateau, vers les 3000 m d'altitude. La lumière est aveuglante derrière la grande baie arrondie, et le pilote nous distille des infos dans le casque, avec un accent toujours compliqué pour nos oreilles de Français. Je l’écoute distraitement, le cerveau accaparé par les prises de vues. À cette altitude, en étant monté si vite, il faut ménager ses globules rouges !


Un virage sur tribord et l’appareil fonce vers les monts Tasman et Cook. Mais, comme prévu, n’ayant pas opté pour le « grand tour », il reste à la même altitude et se dirige vers le glacier Fox, où il se pose quelques minutes plus tard. Trois hélicoptères, d’autres sociétés, sont déjà sur place.

Nous sortons de l’appareil, avec une autorisation de quelques minutes. J’en profite pour filmer et enchaîner les photos pendant que MJ papote avec le pilote aux culottes courtes, incongrues à cette altitude, mais tellement british ! Il fait chaud, et les lunettes de soleil sont évidemment indispensables à cause de la réverbération du soleil.

Malheureusement il faut rentrer, business  is business !


La descente sera faite presque à raz le glacier, à fond la caisse (ou du moins est-ce l’impression que j’en ai eue). Le pilote s’amuse à louvoyer, enchaînant les virages. L’œil collé au viseur de l’appareil, je commence à me demander si mon estomac va résister au traitement. Mais un Franchie se doit de rester droit et digne, surtout face à deux Australiens ! Heureusement il ne faut pas longtemps pour rejoindre le plancher des vaches (que dis-je, des moutons), et  c’est d’un pas (presque) élégant que je saute du cockpit.